C’est devenu une habitude, lorsqu’un indicateur ne convient plus pour mettre en valeur l’efficacité d’une politique, le plus simple et à effet immédiat c’est de le remplacer pour un plus conforme à la volonté politique.
Le dernier cas, le changement de l’indicateur du Plan Ecophyto de réduction de l’usage des pesticides mis en place en 2009. Un indicateur évaluant l’évolution de l’intensité de l’usage des pesticides avait été créé : le NODU. L’élimination du NODU au profit d’un indicateur européen, appelé HRI1, prenant en compte la masse des pesticides (mal) pondérée par leur dangerosité, est considéré comme un recul par France Nature Environnement et 6 autres organisations de la société civile (Fondation pour la Nature et l’Homme, Générations Futures, Humanité et Biodiversité, Réseau Environnement Santé, Ligue de Protection des Oiseaux et WWF France).
Le calcul du HRI1 avec les données françaises montre qu’il donne une fausse image d’une forte baisse (-32%) de l’utilisation des pesticides alors que dans le même temps le NODU montre au contraire une légèrement augmentation (+3%).
Les organisations ont donc claqué la porte du Comité d’orientation et de suivi du plan Ecophyto 2030 car cet indicateur est totalement trompeur puisqu’il va présenter une image de réduction factice alors même que l’usage des pesticides n’a pas baissé depuis le début du plan Ecophyto et que les pesticides sont retrouvés dans nos aliments y compris les eaux minérales.
Or personne ne peut plus le nier, la santé est impactée par l’usage des pesticides !
La manipulation des données de surveillance de la qualité bactériologique des eaux marines est un autre exemple de recul susceptible d’impacter la santé.
Ainsi l’association Eau & Rivières de Bretagne (ERB) s’était aperçu que l’Agence régionale de santé (ARS) de Bretagne prenait prétexte qu’après des pluies la baignade était interdite à titre préventif pour écarter les résultats les plus élevés de la contamination microbiologique du calcul du classement des eaux de baignade des plages bretonnes.
Ce mode de calcul permettait de faire disparaître une grande partie des pollutions mesurées et donc d’améliorer le classement des plages concernées. L’ERB s’étonnait « Comment le classement peut-il s’améliorer alors que les pollutions ne diminuent visiblement pas ? ». L’association a donc saisi le tribunal au sujet de la méthodologie mise en œuvre par l’ARS de Bretagne et dans une décision rendue le 22 juin 2023, le tribunal administratif de Rennes a donné deux mois à l’ARS pour corriger les données de classement des eaux de baignade de la région pour la période 2016-2020…
Localement à Saint-Mandrier, les résultats des contaminations microbiologiques élevées des plages ne sont pas affichés…
Localement Il apparaît également que la fréquence des prélèvements d’échantillons de la surveillance microbiologique de la zone de production conchylicole de la Baie du Lazaret varie au cours des années. L’absence de prélèvement d’échantillon à certaines périodes conduit à un biais méthodologique important quant à la représentativité de cette surveillance considérée par Ifremer comme mensuelle.
Comme en Bretagne, l’Ifremer en charge de la surveillance microbiologique et du calcul de classement de la zone ne tient pas compte de tous les résultats. L’exclusion quasi-systématique par Ifremer des résultats d’analyse obtenus en période de précipitations témoignant d’une augmentation du niveau de contamination dégrade la représentativité de la surveillance en excluant les situations chroniques de contaminations microbiologiques pour le classement de la zone. De plus, la sélection des résultats d’analyse avec l’exclusion d’un grand nombre des valeurs les plus élevées qui apparaît systématique en 2021 et 2022, introduit un biais méthodologique supplémentaire entachant la représentativité de la surveillance et la détermination du classement de la qualité des eaux de cette zone conchylicole.
Aussi, France Nature Environnement et l’APE ont demandé que l‘ensemble des résultats de surveillance microbiologiques soient utilisés pour le calcul du classement des zones de productions conchylicoles. Ainsi, le classement de la zone de production classée de la Baie du Lazaret sera conforme à l’objectif et aux critères de la réglementation en vigueur pour le classement des zones conchylicoles en fonction de la qualité de leurs eaux.
Pour en savoir plus :
- Déclaration commune des organisations COS ECOPHYTO du 12 février 2024
- Pesticides : Gabriel Attal enterre Ecophyto
- L’ARS Bretagne doit revoir sa copie pour les eaux de baignade
- Polémique sur les eaux de baignade en Bretagne : l’Agence régionale de santé devra revoir sa copie
- Courrier FNE-APE du 18 février 2024, Cultures marines Baie du Lazaret, Surveillance microbiologique et biais méthodologique
- Analyse des résultats de la surveillance microbiologique de la Baie du Lazaret - Rapports Ifremer 2022 et 2023