En 2022, les associations environnementales, France Nature Environnement Provence-Alpes-Côte d’Azur et Var avec l’APE, ont demandé l’annulation d’un arrêté préfectoral concernant les recharges en sable de la plage de Sainte-Asile prévues sur 10 ans. En effet, cet arrêté (28 février 2022) avait dispensé la métropole Toulon Provence Méditerranée de réaliser une étude d’impact environnemental pour ces rechargements en sable.
Nos deux associations ont demandé par un premier recours gracieux rejeté puis par un recours au contentieux auprès du tribunal administratif de Marseille l’annulation de l’arrêté de dispense d’étude d’impact pour tenir compte de l’état actuel de l’herbier de Posidonie à quelques mètres de la plage et de son exposition directe.
Lors des opérations de rechargements en sable généralement de carrière concernent toute la section littorale. Ces apports artificiels transforment cet écosystème qui est naturellement composé de galets et de rochers avec une flore et une faune spécifique qui sont recouverts de sable. Les dépôts au contact de la mer sont quasi-immédiatement dispersés dans les eaux et atteignent l’herbier de Posidonies à proximité.
Le préfet de région avait initialement gardé le silence, ce qui équivalait à une acceptation implicite de l’obligation de faire une étude d’impact. Curieusement, il est ensuite revenu sur cette position par arrêté, retirant la décision implicite et exonérant le projet de toute évaluation environnementale.
Finalement, les arguments avancés par nos associations ont été retenus comme des motifs d’annulation par le tribunal. En premier lieu, il a considéré que la gravité des impacts environnementaux avait été sous-estimée par la commune.
En effet :
- Le projet se situe dans une zone protégée (ZNIEFF) abritant des espèces vulnérables et protégées comme la posidonie qui se développe sous forme d’herbier.
- Les travaux prévus, même courts, peuvent provoquer l’ensablement et la dégradation des espèces protégées présentent sur le site, tant dans sa partie marine que terrestre.
- La relocalisation des banquettes de posidonie conduisant à leur destruction en tant que structure a un effet sur leur rôle écologique.
Les banquettes de feuille mortes de Posidonies constituent un écosystème unique avec une faune particulière. Préservées elles forment une structure dense qui résiste aux vagues des largades et protège la côte de l’érosion. C’est une richesse naturelle patrimoniale caractéristique des plages méditerranéenne et provençales en particulier. Elles sont détruites chaque année pour être mélangées avec du sable pour répondre à l’imaginaire de plages hawaïennes bordées de cocotiers. Ce mélange hétérogène, ce gloubi-boulga, est facilement disloqué et emporté lors des tempêtes et le sable se s’accumule sur le fond de galets pour former des rivières de sable s’étendant de plus en plus vers le large dans les herbiers au fil des années. C’est le moment d’admirer les banquettes en place le long de la plage de Sainte-Asile !
D’autre part, il a jugé que le préfet n’a pas correctement apprécié les effets du projet, en particulier en ne tenant pas compte de l’importance écologique de la zone ni du caractère potentiellement irréversible de certaines atteintes.
Enfin, le tribunal a jugé que les critères de la directive européenne 2011/92/UE (concernant l’impact environnemental) avaient été méconnus.
Aussi dans sa décision finale le tribunal annule l’arrêté préfectoral du 28 février 2022 et la décision de rejet du recours gracieux et la demande de remboursement de frais par la métropole Toulon Provence Méditerranée est rejetée.
Cela fait des années que nous pointons la nécessité de réaliser une étude d’impact avant d’enclencher les réensablements. Cette demande des associations a été systématiquement refusée par la commune car le maire M. Vincent, vice-président de TPM chargé de la Protection de l’environnement, est un fervent défenseur de l’ensablement des plages de la commune et du gloubi-boulga (voir légende plus haut). Il ne croit pas à l’impact négatif de l’ensablement des herbiers de Posidonie. Nous avons donc réitéré notre demande à la lecture du projet annoncé en 2022 de réensabler cette plage pendant 10 ans sans aucune étude.
En effet, ce n’est pas une requête extravagante quand on connaît les impacts avérés de ces réensablements sur les herbiers de Posidonies mis en évidence par de nombreuses études scientifiques. De plus, elle nous apparaissait cohérente avec les prises de position en faveur de l’environnement et de la protection des herbiers de Posidonies tant par les services préfectoraux que par certains élus régionaux et locaux.
Il aura donc été nécessaire de porter cette demande devant un tribunal pour que soit réalisée cette étude préalablement à d’éventuelles recharges en sable annuelles prévues pendant 10 ans. Le bon sens a parlé pour garantir la protection des espèces de ce site pour l’intérêt général puisque le tribunal en appliquant le principe de précaution a imposé une étude d’impact sur un site à forte valeur écologique. Quels gaspillages d’énergie et d’argent !
Nous n’avons évidemment pas attendu pour mettre en place un suivi de l’herbier de la plage de Sainte-Asile en particulier de son réensablement et de ses effets sur sa survie.
Le sable ajouté est remis en suspension augmentant la turbidité de l’eau et ainsi réduit l’efficacité chlorophyllienne des Posidonies. Il s’accumule dans l’herbier enfouissant progressivement les rhizomes des Posidonies qui finissent par mourir.
Par endroit, à proximité des herbiers de Posidonie, une autre plante à fleurs et rhizomes est visible bien que de plus petite taille, la Cymodocée. Elle forme des prairies en colonisant les nouveaux espaces de sable et de rhizomes morts des Posidonies.
Une fois encore, la charge de la preuve est laissée aux associations qui ont dû mobiliser des éléments techniques précis, soulignant la complexité pour des ONG de faire valoir leurs droits, vos droits à un environnement préservé.
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Pour la première fois en France, vendredi 22 novembre, la notion de préjudice écologique d'atteinte à l'herbier de posidonie a été reconnue par le tribunal maritime de Marseille qui a condamné à de lourdes amendes deux capitaines de yachts (de plus de 24m) pour avoir jeté l'ancre dans des zones interdites au mouillage afin de protéger l’herbier de posidonies.
"Cette décision de justice inédite contribue à l'efficacité de la politique de protection des herbiers de posidonie" s'est réjoui de son côté la préfecture maritime de Méditerranée dans un communiqué. Rappelons que cette plante endémique de la Méditerranée sert de puits de carbone, de nurseries pour poissons et protège le littoral contre l'érosion côtière.
Deux associations de défense de l'environnement en Provence-Alpes Côte d'Azur, France Nature Environnement (FNE) et la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), avaient demandé au tribunal que le préjudice écologique soit aussi pris en compte afin d'obtenir réparation.
FNE précise que « Notre objectif est donc d’obtenir une protection efficace et effective des herbiers de Posidonie, ce poumon de la Méditerranée, afin que ces atteintes cessent et que nous ne soyons plus contraints de nous rendre au tribunal ».
En effet, l’APE et FNE ont déposé des recours devant le tribunal administratif pour une autre atteinte mettant en péril les herbiers de posidonies, les recharges en sable des plages de la presqu’ile de Saint-Mandrier. Les tonnes de sable de carrière déversés chaque année sur les plages sont dispersées en mer par les tempêtes pour finir à enfouir les herbiers. Ainsi, les herbiers présents à proximité de la plage de Sainte-Asile ainsi que le récif frangeant de la plage de La Vieille sont détruits progressivement mais inexorablement par ces recharges en sable anachroniques.
Pour en savoir plus
Mouillages illégaux et posidonies : un précédent juridique en création
La justice française reconnaît le préjudice écologique d'atteinte à l'herbier de posidonie
Alexandre Briano s'est éteint ce 5 septembre à l’âge de 91 ans. Passionné d’histoire locale, il était un homme engagé, militant infatigable pour la protection de l’environnement. Co-fondateur de l'association Défense et protection du Faron et président du comité d'intérêt local du Mourillon-centre jusqu’en 1988, il s’était engagé très tôt dans le combat pour préserver les herbiers de Posidonie.
Ainsi, en 1978 il s’était enchainé à un bulldozer pour stopper les travaux d’endigage de l’anse Tabarly et des plages artificielles du Mourillon demandant, avec 26 associations, la protection des herbiers de Posidonie encore présents à l’époque. Aujourd’hui, il serait traité d’écoterroriste !
Il écrira un livre retraçant ce combat : Un amour de Posidonie. Il y décrit l'opposition des 36 associations varoises et plus particulièrement toulonnaises contre le tout béton et les endigages du littoral toulonnais, aujourd'hui limités par la loi afin de protéger, entre autres espèces, les posidonies.
Les actions de ces écologistes de la première heure localement avaient été initiées en 1970 avec un recours en annulation auprès du tribunal administratif du gigantesque endigage, sur plusieurs kilomètres de littoral toulonnais, projeté par la chambre de commerce du Var.
Evolution du littoral Mourillonnais entre 1950 et aujourd’hui (Source IGN – Remonter le temps).
Ces 36 associations par leur action ont finalement eu raison du projet municipal, déjà d’un autre temps, qui prévoyait un port de plaisance de 500 anneaux en eaux profondes, une voie rapide sur le littoral, la mise sur le sable du fort Saint-Louis, la construction d'hôtels par la vente de l'espace public gagné sur la mer, etc. Une bétonisation rampante anachronique qui a encore de nombreux partisans locaux très actifs…
Alexandre Briano, une belle personne à qui nous devons beaucoup pour la préservation de notre environnement. Un grand merci pour ton engagement !
Pour en savoir plus : Un amour de Posidonie
La Marseillaise publie un article sur les dégâts produits par l'articificialisation des plages. Pour lire l'article complet, cliquez sur l'image ou écrivez-nous à l'adresse
Il y a deux jours nous vous avions présenté le clapage des feuilles de Posidonie qui ont la mauvaise idée de s’accumuler à la côte, en particulier dans les ports mal conçus comme ceux de Saint-Elme ou de port Méditerranée de Six-Fours. De véritables nasses pour ces feuilles en vadrouille. Aujourd’hui, nous vous proposons un nouvel exemple local de la dure vie des Posidonies (Posidonia oceanica) de notre littoral, toujours celle de l’anse des Sablettes mais qui est considérée comme une estrangère à Saint-Mandrier, au niveau de la plage de Sainte-Asile.
Dans le premier article, nous vous avions mentionné l’importance écologique du magnifique herbier de Posidonie qui se développent entre 3m et 30m de profondeur dans l’anse des Sablettes. Sa richesse en nombreuses espèces marines (biodiversité), incluant des espèces protégées et l’importance de ses potentialités biologiques importantes ont conduit les scientifiques à classer cet herbier comme une Zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF).
Cet herbier, rappelons-le, s’étend de l’anse de Fabrégas et la pointe de Mar Vivo à l’ouest au prolongement de la plage de Sainte-Asile à l’est.
(Source : DONIA EXPERT : Cartographie détaillée des habitats marins - Données consultées le 14 aout 2024 sur la plateforme de surveillance MEDTRIX - https://plateforme.medtrix.fr).
La vaste étendue de l’herbier de l’Anse des Sablettes de plus de 200 hectares montre des signes de régression dans sa partie la plus profonde, entre 20 et 30m de profondeur, où sont observés des rhizomes morts de Posidonie sous forme d’une bande et de taches.
Justifiée par une politique visant à favoriser le développement touristique, les gestionnaires de la commune ont décidé l’artificialisation du littoral de la presqu’ile de Saint-Mandrier. Le bord de mer a ainsi été remanié pour y créer des plages. Pour exemple, la plage de Sainte-Asile naturellement constituée de galets a été artificialisée par des apports annuels de sable de carrière. Heureusement la partie au nord abritant une pinède est protégée par la loi Littoral en tant qu’espace naturel, elle a été plus faiblement artificialisée, tandis que la partie sud urbanisable a été « repensée » par les gestionnaires de la commune, qui promoteurs du rêve américain[1], ont tenté de reproduire les côtes californiennes ou hawaïennes en implantant une ligne de palmiers Washingtonia.
Devinette : Pour se mettre à l’ombre l’été, quels bancs faut-il choisir : ceux dans la pinède ou ceux sous les palmiers ?